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16 juillet 2007

Le Ksar d'Aït Benhaddou

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Aït Ben Haddou ou le sablier du temps.

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La plus belle route du Maroc
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Depuis Telouet où je vous ai laissés la dernière fois, plusieurs solutions s'offrent à vous pour rejoindre Aït Benhaddou. Soit vous avez le temps et un véhicule adapté et vous empruntez la piste de 35 km qui s'étend au-delà de Telouet (comptez bien 4 heures de route et une piste par endroit défoncée… et évitez de partir trop tard pour ne pas avoir à effectuer une partie de la route la nuit.. !) soit vous choisissez le mode de déplacement le plus rapide (encore que…) en suivant l'asphalte qui mène de Marrakech à Ouarzazate (nationale 9) et qui après le village d'Amerzgame, sur la gauche, vous mène directement à l'un des Ksour les mieux préservés de tout le Sud marocain.

Vous seriez impardonnables de ne pas faire cette visite là…elle vous laissera des images incroyables dans la tête et des souvenirs à foison.

Je ne sais pas si je vous l'ai déjà dit, mais la route entre Marrakech et Ouarzazate passe pour être une des plus belles routes du Maroc, et elle est certainement de toute façon, la plus belle route de montagne du pays qui soit.
Au détour d'un virage, à hauteur de l'oued Mellah, le spectacle est étonnant ! Rivé à une sorte de butte, un bel assemblage de tours crénelées se détache sur l'horizon. Les tours de la kasbah d'Aït Benhaddou se réfléchissent dans l'oued.

Après avoir laissé votre véhiculedans le village neuf, c'est par une sorte de porte basse, sur la droite du village, que vous entrerez dans le royaume de ce Ksar merveilleux. Ici les éléments du conte d'Emile et Inuit (le célèbre !) sont assemblés pour que l'on puisse se souvenir de cette fortification de terre et de roseau comme d'un lieu magique et chargé d'histoire.


Un village nomade.
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De nos jours Aït Benhaddou est UN village et PLUSIEURS à la fois. En réalité l'implantation du village a connu successivement trois emplacements.

Au départ il y eut les simples maisons réalisées en pisé, édifiées à même la colline, autour de l'agadir (le grenier-forteresse), et cernées d'une muraille de clôture. Elles garantissaient autrefois la sécurité de la population et des biens contre les pillards venus de la plaine. Il faut rappeler que cette vallée de l'oued Mellah était naguère fréquemment empruntée par les caravanes des marchands et celles-ci excitaient bien des cupidités...

Puis à la fin du 19ème siècle, alors que la situation sécuritaire s'améliore, les occupants du village bâtissent des maisons en-deça de l'enceinte protectrice, sur la face la moins escarpée de l'éminence (pas grise mais rocheuse !). C'est le plein essor des kasbahs ; dans lesquelles la sécurité individuelle prend le pas sur le bien être collectif. Derrière les kasbahs, tandis que les vieilles maisons tombent en désuétude et subissent les outrages du temps, des demeures plus simples s'érigent.

Et pour finir, depuis une quarantaine d'années environ, les habitants du village ont retraversé l'oued en sens inverse, ont quitté la Kasbah (un peu désertée du coup) pour édifier de nouveaux groupes de maisons sur la rive droite de l'oued. C'est d'ailleurs par la « ville nouvelle » que l'on parvient au site. Il n'est guère besoin de perdre du temps dans les ruelles qui séparent les nouvelles constructions, la beauté du lieu est ailleurs… suivez-moi !

  Tu es poussière… et tu retourneras en poussière !!!
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Une fois la porte du nouveau village franchie vous aurez une vue saisissante sur l'extérieur du ksar d'Aït Benhaddou! Pour y parvenir, il faut emprunter un petit sentier qui descend jusqu'à l'oued.
Tandis que les mômes du coin tenteront de vous aider à traverser l'oued en marchant sur les cailloux ordonnés dans son lit vous aurez peut-être l'occasion d'apercevoir quelques femmes, aux tenues bigarrées, laver leur linge dans la rivière…

Et si vous vous sentez l'âme d'un Lawrence d'Arabie (une partie du film et d'autres y ont été tournés jadis… j'y reviendrai),vous pourrez louer les services d'un chameau dont vous aurez soin de marchander le prix sous peine d'arnaque manifeste ou en cas de crue de l'oued, monter à dos de mulet pour rester les pieds au sec.

Afin de visiter dans les meilleures conditions ce bijou architectural, inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco depuis 1987, il faut aller se perdre dans les méandres des petites ruelles et des chemins escarpés. La majeure partie des maisons est désormais abandonnée.

Ainsi donc, irréparablement contraintes à retourner à la poussière à cause des intempéries qu'elles subissent, les maisons s'affaissent, s'écroulent et s'amenuisent. Seules quelques familles (une dizaine mais un programme, semble-t-il, prévoit d'en « réimplanter » d'autres) vivent encore dans ces demeures de pisé antiques.

  Une Cinecitta (bis) du Sud marocain… ?
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Outre son classement au patrimoine de l'Unesco, Aït Benhaddou doit probablement une partie de sa renommée mondiale au 7ème art. La mémoire du réalisateur David Lean flotte pour longtemps au-dessus du site et les vieux murs de pisé se souviennent toujours du tournage de "Lawrence d'Arabie".

Quelques habitants se souviennent peut-être encore du bruit des 20.000 figurants chevauchant leurs dromadaires... ou certains autres revivent aussi les scènes les plus mémorables de "Sodome et Gomorrhe".

Plus récemment, il y a plus de 20 ans quand même, en 1984, c'est Michael Douglas qui était venu chercher son diamant perdu (« Les Diamants du Nil »).
Pour les besoins du film une immense porte avait été construite, et Douglas devait y passer dessous aux commandes d'un avion. Réalisée une première fois un peu « juste », la construction s'effondra comme un fétu de paille au premier passage… il fallut la reconstruire ! Mais peu importe… ce travail réalisé par les artisans locaux, ramène aux habitants du village notoriété et monnaie sonnante et trébuchante… En jouant comme figurants dans les productions, en louant leur terre ou en travaillant à la construction des décors, les habitants du coin sont ainsi parmi les plus riches de la région !

La liste des films tournés en totalité ou en partie dans les studios du Sud marocain et dans la région est encore longue : « Harem » (Arthur Joffe, 1985) « Edith et Marcel » (Claude Lelouch, 1983), " »Roll Over » (A. Pakula, 1981), « Liberté, Egalité, Choucroute » (Jean Yanne, 1984), « Des Mots pour le dire » (Vera Belmont, 1983), « Jesus de Nazareth », « La dernière tentation du Christ », « Kundun », « La momie »« Cléopâtre »,« Gladiator », ou encore « Alexandre »..et j'en passe !


La cité du pisé et la kasbah.
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Jaillissant de ce sol ocre et rosé dont il a puisé les matériaux même qui le composent, Aït Benhaddou parait sortir d'un songe issu des temps immémoriaux. Accoté au pied de la colline à laquelle il s'appuie, l'étendue verdoyante de l'oasis, aux alentours, des collines dépouillées, et dans le lointain, entourant âprement l'horizon, l'étonnant désordre des sommets du Haut-Atlas donnent à l'ensemble un côté sauvage délicatement apprivoisé.

C'est sur des fondations de pierre, comme la plupart des kasbahs, que repose celle-ci. Elle est flanquée d'une tour à chaque angle. On pénètre dans la kasbah par une lourde porte en bois ouvragé et on accède ainsi au rez-de-chaussée dans lequel on découvre une reconstitution fidèle d'un intérieur de l'époque : sont visibles successivement un four en terre, une sorte de fourneau pour cuisiner, une meule à grain, quelques vieilles théières en poteries et métal et un peu plus loin, les outils nécessaires au travail de la laine qui servait à la confection des tapis. On dirait en passant dans ces pièces où la pénombre règne, que la vie est suspendue, à un fil, le fil du temps qui passe et que chacun tire, à son tour, pour dérouler l'histoire de ce vieux ksar en perdition.

Par un escalier un peu raide, on accède au toit, d'où la vue sur les alentours et sur le reste du ksar est imprenable. En se retournant on embrasse tout le panorama de la vallée et l'oasis en son sein, et de l'autre côté, c'est la couleur ocre de la terre et du pisé des maisons voisines jusqu'en haut de la colline qui domine. Ça et là, quelques tâches de couleurs émanant de tapis que l'on a mis à sécher, attestent qu'il y a encore quelques familles qui vivent ici…

La toiture-terrasse est établie sur des poutres faites de palmier (pas les gâteaux suivez ! Sinon ça ne tiendrait pas) ! Le plancher, quant à lui est recouvert de branchages, et enfin de terre bien tassée. La sensation, quant on marche est assez étrange je dois dire, et je me suis demandé à plusieurs reprises si nous n'allions pas tout simplement passer à travers le toit… c'est à la fois souple et mou mais paraît solide…
En fait le toit est en légère pente, pour l'écoulement des eaux de pluie vers les gargouilles. Les parties supérieures de la kasbah sont décorées de motifs géométriques d'inspiration berbère (que l'on retrouve sur les bijoux et les tapis : croix du sud, chemin nomade, œil, etc).


Le reste du ksar.
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Outre la kasbah, qui mérite déjà la visite à coup sûr, il faut ensuite déambuler dans les rues du village, tout en escalier, en pente et en terrasses où l'on peut trouver au détour d'une rue, une cigogne venue reposer ses ailes, une vieille femme en train de filer de la laine (plus là pour le folklore ou les quelques dirhams qu'elle pourrait glaner en tendant la main à votre passage car la pelote n'était guère conséquente quand nous sommes passés puis repassés…), un homme en train d'égorger une chèvre dans la rue (c'était la veille de l'Aïd, donc compréhensible), quelques touristes mais peu finalement à cette époque-ci de l'année, quelques boutiques de souvenirs et d'artisanat local aussi et des murs, des remparts, des murailles, des pierres, des maisons qui s'écroulent et des restes d'anciennes demeures tombées dans l'oubli…

Prenez le temps de grimper jusqu'en haut, tout en haut du village à l'endroit des premières maisons à présent en ruines, et ouvrez les yeux sur le panorama qui vous entoure : la chaîne de l'Atlas, immense, majestueuse, plus prêt de vous l'oasis, et cette espèce de plateau rocheux qui en fixe les limites sur ses flancs, étonnante curiosité géologique qui émerge au milieu de la plaine…

La sauvegarde.
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Le vieux Ksar d'Aït Benhaddou a été inscrit sur la Liste du Patrimoine mondial de L'UNESCO en 1987, à un moment où il ne restait plus dans l'ancien village que quelques familles, la quasi-totalité des habitants étant partis s'établir sur l'autre rive de l'oued. Or l'architecture de terre, le pisé et l'adobe, est d'une fragilité extrême, et une demeure inoccupée se délabre inéluctablement. A chaque pluie un peu forte, à chaque orage lessivant, c'est un peu plus encore de ce jalon du passé de la vallée qui s'amenuise et qui s'efface.

L'Unesco retient 2 critères pour classer ce site sur la liste du patrimoine mondial :

« offrir un exemple éminent d'un type de construction ou d'ensemble architectural ou technologique ou de paysage illustrant une ou des périodes significative(s) de l'histoire humaine ; » ;
« être un exemple éminent d'établissement humain traditionnel, de l'utilisation traditionnelle du territoire ou de la mer, qui soit représentatif d'une culture (ou de cultures), ou de l'interaction humaine avec l'environnement, spécialement quand celui-ci est devenu vulnérable sous l'impact d'une mutation irréversible ; » (source http://whc.unesco.org/fr/criteres/).

On comprend donc pourquoi et comment ce lieu chargé d'histoire, de tradition et au patrimoine architectural si précieux se doit d'être conservé et de demeurer encore longtemps, le témoin vivant de cette superbe région et de ses habitants attachés à leur culture et à leurs racines. Mais il reste encore beaucoup à faire dans ce domaine…et les effets secondaires d'un tourisme parfois mal développé sont parfois aussi pernicieux que l'usure du temps.

C'est les yeux pleins d'images, la tête pleine de souvenir, et le cœur plein de chaleur humaine que nous avons quitté le vieux Ksar, retraversé l'oued, poursuivis par les enfants, sous le regard des dromadaires indolents.

Nous sommes remontés dans notre minibus, et loin de l'agitation somnolente du village neuf, nous avons continué la piste jusqu'à l'auberge située en plein étendue quasi désertique sur la piste qui conduit à Telouet.

Tout en dégustant le repas qui avait été préparé pour nous, nous nous interrogions sur le devenir de cette région et de ses habitants. Notre guide Mohamed et notre ami Abdil nous ont confié qu'eux aussi étaient un peu inquiets, un plan spécifique prévoit de goudronner la piste que nous avons empruntée jusqu'à Telouet, créant l'ambivalence du progrès et de la destruction du milieu.

Gageons que les habitants de la région sauront toujours maintenir l'équilibre entre ce qui les fait vivre et ce qui leur permet de vivre mieux… « Inch Allah » !

Chrispix

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